
Peu connu du grand public, ce zoom vous permettra de mieux connaître cet oiseau semblable aux alouettes.
L’oiseau à la huppe
Le Cochevis huppé (Galerida cristata) est un petit passereau aux mœurs terrestres : il appartient à la famille des alaudidés (alouettes). Le cochevis ressemble à l’Alouette des champs. Il s’en distingue par un corps plus trapu, une queue plus courte et des ailes plus larges. Son bec est un peu plus long et marqué. Le critère le plus remarquable est sa huppe effilée qu’il porte au sommet du crâne, qu’il peut ré tracter et redresser (l’Alouette des champs possède aussi une huppe mais plus petite et pas aussi souvent redressée).
Le cochevis présente un plumage brun-gris sur le dessus et le manteau, moins fortement moucheté que la plupart des alouettes. Le dessous et les parties inférieures sont chamois sableux avec des stries brun noir au niveau de la poitrine. Ses rectrices externes sont rousses (alors qu’elles sont blanches chez l’Alouette des champs). Mâle et femelle sont identiques et les jeunes sont plus fortement tachetés et leur huppe plus petite.
Son chant rappelle celui de l’Alouette des champs : fluté et gazouillant mais plus lent et sans phrase répétée. Son cri est mélodieux. Le cochevis huppé est peu farouche et ne s’envole qu’à quelques
mè tres lorsqu’on l’approche.
L’adepte des zones industrielles et autres milieux anthropisés…
Ce passereau sédentaire ayant la steppe pour écrin originel, a su s’adapter à des biotopes plus anthropophiles. Le cochevis colonise de nos jours les friches et les terrains vagues, les chantiers de construction, les zones industrielles et commerciales ainsi que leurs parkings pour peu qu’ils soient modérément entretenus ; en somme tout un panel d’habitats ayant pour points communs leur platitude, leur aridité, leur forte ouverture, une végé tation rase et des plages au sol dénudé. Les toits en terrasse, les terres envahies de « mauvaises herbes », les décharges communales, les champs de manœuvres, les grands rond-points végé talisés, les talus de chemin de fer, les remblais quelconques, etc. sont autant de « biotopes » qui lui rappellent des morcellements de son habitat d’origine. Alors ouvrez l’œil !
… et de la Champagne crayeuse
En Champagne-Ardenne, il niche principalement dans la partie centrale de la Marne et dans un grand quart nord-ouest de l’Aube, zone correspondant à la Champagne crayeuse, où se concentre la quasi-totalité de ses effectifs. Il est très rare dans les Ardennes et totalement absent de la Haute-Marne. Le cochevis se cantonne alors principalement aux abords des zones cultivées (betteraves) des villages et des grandes agglomérations.
Oiseau aux mœurs terrestres, la base de son régime alimentaire se compose de graines récoltées au sol ou directement sur les plantes basses d’où le report sur les milieux périurbains (les ressources sont rares en plaine). Son menu est complé té par des pousses, des bourgeons, des fleurs, des céréales et des feuilles. Les invertébrés sont une source de nourriture appréciée notamment en période de reproduction. Il capture alors avec vivacité des insectes (coléoptères, sauterelles, fourmis et chenilles), des araignées, des escargots et des petits vers.
Particularités
Hors saison de reproduction, les couples de cochevis restent unis, ce qui est un comportement assez rare chez les petits passereaux. De petits groupes, possiblement familiaux, peuvent également se former. Une autre particularité du cochevis est qu’il est doué pour les imitations. Dans son chant, il intercale des imitations des sons de son environnement (chants d’oiseaux, sifflets, sifflements humains, etc.).
Une troisième spécialité peu connue, est que les alaudidés ne se baignent pas dans l’eau. Ils prennent uniquement des bains de poussière, pour entretenir leur plumage et se débarrasser des parasites.
Petit cochevis devient grand En général, le Cochevis huppé niche deux fois par an, d’avril à juillet. Le mâle entonne son chant d’un endroit élevé, que ce soit un tas de pierre, un mur, une motte de terre ou tout autre monticule. Il lui arrive également de chanter en vol, au-dessus de son nid.
La femelle construit un nid au sol, bien souvent contre une pierre ou une touffe d’herbe, dans une culture, une jachère, un terrain vague. Il est fait de brins d’herbe, de petites racines et de feuilles. Elle couve seule durant une douzaine de jours ses trois à cinq œufs (reconnaissables à leur livrée grise tachetée de brun). Les poussins quittent le nid dès le neuvième jour, avant même de savoir voler. C’est au bout de vingt jours qu’ils prendront leur envol. Ils seront encore alimentés quelques jours avant leur émancipation. Les parents nourrissent leurs jeunes essentiellement d’insectes et de vers.
Menaces
En déclin au niveau européen, la population régionale du Cochevis huppé est évaluée à 200-300 couples. La littérature indique qu’autrefois sa présence é tait surtout liée aux chevaux et à leurs crottins nourriciers (graines non digérées) : sa régression serait directement en rapport avec leur disparition au profit des engins motorisés. Cependant les naturalistes ne sont pas vraiment d’accord avec cette version. Si cette explication est peut-être plausible en milieu périurbain, elle est invraisemblable pour ce qui concerne les
populations vivant en dehors de ces milieux.
Il est vrai que la disparition des grandes zones de savarts et de steppes de la région à la fin du 19ème siècle, au profit des cultures intensives et tous les produits phytosanitaires associés, n’est pas étrangère à son recul ! La destruction des nichées par les travaux d’entretien, l’emploi de pesticides dans les espaces verts et autres milieux urbains, la prédation des chats domestiques sont des causes de régression. Les tontes à répétition dans ces mêmes espaces réduisent fortement les ressources en graines et insectes, indispensables au cochevis. Enfin, l’étalement et la densification des espaces périurbains sont une menace de son habitat, n’offrant plus d’espaces interstitiels entre le bâti et les champs où l’espèce trouve refuge jusqu’alors.
Une enquête spécifique
La LPO Champagne-Ardenne se lance dans un large recensement de cette espèce patrimoniale et fortement menacée sur les départements de la Marne et de l’Aube. Ce projet bénéficie d’un financement reçu dans le cadre du Zevent.
Débutées en 2023, les prospections se poursuivront sur l’année 2024. A cette première phase essentielle de mise à niveau de la connaissance, succéderont des actions de sensibilisation auprès des communes et des entreprises dans le but de préserver des zones de nidification favorables aux mœurs de l’espèce.
Toutes les donnée sont essentielles alors ouvrez l’œil et n’hésitez pas à transmettre toute observation via l’application Naturalist ou le portail Faune-Grand Est pour faire avancer les connaissances. Merci à vous !
Rédaction : LPO Champagne-Ardenne
Photo de couverture : Dominique et Franck Moinault (publiée sur Faune Grand Est)
Article paru dans Faune Champagne-Ardenne Infos N°32 – 1er septembre 2023 au 30 novembre 2023