En 2018, un hiver froid et pluvieux en Lorraine
L’année 2018 a démarré par un hiver assez froid et pluvieux en Lorraine – un hiver classique en somme – et les mangeoires étaient très fréquentées ! En effet, l’automne précédent a été marqué par des afflux importants de plusieurs passereaux forestiers : Grosbec casse-noyaux, Mésanges bleues et noires… (voir le rapport du suivi de la migration à la colline de Sion ici).
Ces migrateurs ont en grande partie passé l’hiver en France et ont fait le bonheur des observateurs lors du comptage Oiseaux des jardins qui se déroule le dernier week-end de janvier. En effet, plus d’un quart des jardins participants ont accueilli un Grosbec casse-noyaux lors de ce weekend de comptage. C’est 18 fois plus que l’année dernière ! De nombreuses autres espèces étaient également en abondance notamment la Mésange noire et le Tarin des aulnes.
Printemps-été 2018 : conséquences de la météo sur le suivi
Là les choses se compliquent, les hirondelles et de nombreux passereaux insectivores se font attendre
longtemps, la faute à des conditions sévères en Afrique du Nord et en Espagne, avec tempêtes à répétition en févriermars et une très forte mortalité des migrateurs sur la route du retour. A l’arrivée, le constat est assez dramatique avec de nombreuses colonies désertées (Hirondelles de fenêtre
et de rivage) et une baisse notable des couples nicheurs constatée dans les villages (Hirondelle rustique).
Par la suite, un épisode de sécheresse exceptionnel a débuté en mai et s’est prolongé jusqu’à la fin de l’automne dans de nombreuses régions françaises et plus particulièrement dans le Grand Est. Le début de cet épisode a pu profiter aux insectes mais rapidement la végétation a souffert du déficit hydrique et les insectes ont largement décliné. C’est le cas également pour les rongeurs, qui sont vite retournés
dans leurs galeries se mettre à l’abri. Ainsi toute la chaîne trophique a été affectée, les prédateurs en fin de course n’avaient plus grand chose à se mettre sous la dent…
Cette conséquence a été bien visible dans les suivis de plusieurs espèces de rapaces nicheurs en Lorraine, avec des échecs de reproduction nombreux et une surmortalité des jeunes même après l’envol. Chez le Grand-duc par exemple le taux d’échec en 2018 est de 65%, avec un succès reproducteur de 0,8 pour le sud lorrain (voir le rapport ici). La situation est moins contrastée chez le Milan royal avec un succès reproducteur dans le sud lorrain de 1,33, une année assez médiocre, tandis que la reproduction a été meilleure dans la plaine vosgienne Est où la végétation a peut-être moins souffert de la sécheresse (voir le rapport ici). D’autres facteurs que la météorologie rentrent en jeu pour expliquer ces résultats, mais elle y tient une place prépondérante.
L’automne 2018 en Lorraine
Le mois d’octobre a bénéficié d’un petit été indien, cela n’a pas pour autant retardé les migrateurs dans leur périple. Au contraire, il semble que chez de nombreuses espèces de rapaces et quelques passereaux, les dates de passage en Lorraine et dans l’Est de la France étaient plus précoces de quelques jours en 2018 par rapport à la moyenne des années passées.
La mauvaise saison de reproduction a pu inciter une partie des migrateurs, notamment les couples nicheurs en échec, à partir plus tôt. De plus, moins de jeunes à l’envol se traduit par moins de migrateurs tardifs, en effet les juvéniles partent souvent bien plus tard que les adultes chez les espèces qui migrent en solitaire.
Enfin, après une année d’invasion de certains passereaux forestiers, la migration postnuptiale en 2018 a été très calme avec des effectifs réduits voire quasi nuls de Mésange noire, Grosbec casse-noyaux… La saison de migration de retour a donc globalement été plus calme.
Article paru dans la lettre d’informations Faune Lorraine Infos N°15 du 1er juin au 31 août 2019